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Le journal d'un excessif
30 avril 2008

Nick Cave au Casino de Paris

2008_04_Nick_Cave_047"Ceux qui veulent tout connaitre sur le monde, écoutez ! Vous allez recevoir la connaissance". Qui d'autre que Nick Cave peut présenter ainsi l'une de ses chansons sans que cela prête à rire (même si l'on nage évidemment en pleine auto-dérision) ou que cela soit ridicule ? Parce que la chanson, c'est "We Call Upon the Author to Explain", l'un des textes les plus puissants de "Dig Lazarus Dig", et accessoirement l'un ses sommets du concert de ce soir. Où l'on est en train d'apostropher le Créateur - qui bien entendu, n'existe pas - pour lui demander des comptes...

Voilà près de 15 ans que je n'ai pas vu Nick Cave and the Bad Seeds sur scène - même si je n'ai pas, depuis, manqué un seul de leurs albums, qui ont quasi systématiquement figuré dans mon Top 10 de leur année de parution... -, et je passe les premières minutes du concert à me familiariser à nouveau avec eux : un nouveau look pour Cave (la moustache, un peu ridicule, mais qui le rajeunit) et Warren Ellis (en sosie de Raspoutine : hallucinant !), un nouveau son pour les Bad Seeds - qui n'ont plus cette superbe amplitude qui conférait un souffle presque "cinématographique" aux grandes compositions de Nick Cave, mais jouent2008_04_Nick_Cave_070 maintenant avec une approximation brutale à la fois surprenante et revigorante -, et en général un nouvel esprit, immédiatement perceptible dès les premières mesures du premier morceau ("Night of the Lotus Eaters") : on n'est plus à l'époque de la transe, de l'hystérie, de la théâtralisation de chaque chanson comme une épopée dantesque et torturée, quand la musique de Nick Cave tétanisait par sa beauté et sa fureur... Non à 50 ans, Nick Cave, à la fois apaisé (à cet âge-là, soit on a vaincu ses démons, soit on leur a succombé et on en est mort !) et pugnace, joue du ROCK'N'ROLL (enfin, sa définition du Rock'n'Roll, avec textes métaphysiques et grincements d'instruments torturés) et est un GRAND show man. Suivant son état d'esprit, le spectateur trouvera cela décevant - plus vraiment de ces instants foudroyants de rage ou de splendeur - ou réconfortant : car Nick Cave and the Bad Seeds "envoient la purée" ce soir. Le son est dantesque, fort pour une salle comme le Casino de Paris, principalement constitué par les deux (2 !) batteries et la basse (boostée par un énorme caisson placé dans la fosse à 50 cms de mes oreilles, mamma mia !), sur lequel brodent occasionnellement les orgues grinçants et désaccordés (Cave et Harvey s'amusent comme des petits fous avec les sons affreux que Cave tire de son clavier, parfois à tord et à 2008_04_Nick_Cave_074travers, surprenant les autres musiciens) et les guitares et violons cacochymes mais furieux.

Nick Cave est d'humeur très badine, menant un dialogue constant avec la foule - tous des fans ! quel public ! -, à l'écoute des commentaires et requêtes de tous, y répondant avec son sens de l'humour froid habituel (à un spectateur qui lui demande je ne sais plus quelle chanson, il répond "qu'ils n'ont plus assez de neurones pour la jouer, celle-là" ; et quand un autre lui fait une autre proposition, il rétorque "Pour celle-là, ça va, mais on ne va pas la jouer quand même !")... La set list est à la fois structurée - en gros, la quasi intégralité de l'album "Dig Lazarus Dig" en y intercalant une poignée de classiques de l'incroyable répertoire des Bad Seeds depuis 24 ans..) et très ouverte : plus le concert avance, plus Nick Cave commence à choisir suivant son inspiration le prochain morceau, et la décision, fort peu démocratique (seuls Harvey et Ellis sont parfois consultés, d'ailleurs eux2008_04_Nick_Cave_138 deux seuls sont sur le devant de la scène du Casino, un peu étroite pour les 7 membres du groupe), est ensuite rapidement diffusée à l'arrière de la scène : cette liberté donne des résultats surprenants - le premier rappel est quasiment entièrement consacré à des titres peu joués sur scène (deux extraits de "Your Funeral... My Trial" dont un "Hard On For Love" épileptique, et un "Far from Me" de l'époque triste de "Boatman's Call", qui constituera la seule ballade poignante de la soirée...) - mais est finalement le meilleur gage possible du fait que nous avons devant nous une troupe de musiciens qui s'amusent, et un vrai LIVE, chaotique à l'occasion (Nick Cave oublie certains passages de ses interminables textes, et se réfèrent à ses anti-sèches géantes placées sur une table devant lui), mais toujours généreux.

Les plus beaux moments de la soirée (outre "... Author") seront, pour moi, les deux passages de furie bruitiste de "Red Right Hand" et "Stagger Lee" en second rappel (je sais, je me contredis, mais c'est vrai que c'est bon de retrouver en de brefs instants la splendeur passée...), le "stomp" jouissif de "Get Ready for Love", depouillé de ses tensions gospel, et l'orage éternellement funèbre de "Tupelo". Et non, ils n'ont pas joué "The Mercy Seat", mais ce sera peut-être pour la prochaine fois, à l'Olympia, dans quelques semaines seulement...

L'intégralité de ce compte-rendu est posté sur le blog des Rock'n'Roll Motherf***s !

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Commentaires
A
Merci pour ce compte rendu. :)
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