Révisons nos classiques : "Parle avec Elle" de Pedro Almodovar
Le fait de vivre en Espagne et de connaître un peu mieux la culture espagnole permet de jeter un regard neuf sur ce "Parle Avec Elle", que je ne suis pas loin de considérer comme l'un des plus grands Almodo, voire même l'un de mes filsm préférés de ces 20 dernières années. Le rapport que les Espagnols entretiennent avec Almodovar est beaucoup plus crispé, difficile, que les Français, et il est de bonne guerre de reprocher au "phare de la movida" sa complaisance envers les pires clichés de la culture espagnole - qu'on retrouve ici, mais sublimés (je pense à la corrida) - ou envers des situations volontaiement outrées et provocatrices - là aussi, le viol d'une patiente dans le coma ne plaira pas aux plus sensibles. Dans "Parle Avec Elle", Almodovar semble pourtant réconcilié avec son pays, dont il fait se rencontrer la culture avec d'autres (le Brésil, d'abord, et les Etats-Unis du cinéma, puisque formellement, voici le film le plus hitchockien d'Almodovar), mais aussi le plus précis, le moins expansif et joyeux : au final, derrière cette histoire d'amour (entre hommes et femme, entre hommes aussi) et de transmission terriblement belle, contée avec une pudeur inattendue, il y a une vision extrêmement ambitieuse du cinéma comme art populaire au sens noble du terme, une croyance dans le fait que la facilité n'est pas inévitable quand on veut parler au coeur du spectateur.