Supergrass à l'Elysée Montmartre le Jeudi 12 Juin
Supergrass, groupe quasiment majeur en Angleterre (et au Japon, visiblement, si
l'on tient compte du nombre de nippons et -ponnes dans la salle), est venu avec
un matériel impressionnant : superbe rack de guitares sur la gauche, écran
lumineux géant (pour l'Elysée Montmartre) dans le fond, un peu de paillettes
partout pour le glamour... 21 h 00 : Gaz Coombes apparaît en scène avec ses
trois acolytes... qui sont, surprise, quatre, puisque un nouveau venu, présenté
plus tard comme Charly, truste le devant de la scène (J'apprendrai sur le net
qu'il s'agirait d'un troisième frère Coombes, décidément, c'est une affaire de
famille, Supergrass !). Gaz, il me fait penser physiquement à un mélange de
Philippe Katerine (mais sans la lubricité) et de Denis Lavant (mais sans le
passage sous les ponts de Paris avec Carax), habillé ce soir en droogie d'Orange
Mécanique (mais sans la méchanceté violente). Juste en face de nous, il est
plutôt sympa, intéressant à regarder et tout et tout. Derrière moi, une
adolescente nippone de 130 centimètres de haut hurle à pleins poumons, m'enfonce
ses petits coudes pointus dans les côtes et nous
assourdit, Gilles B et moi, de
ses cris hystériques, en tentant de survivre dans la mêlée : la vie rock'n'roll
quoi ! Le concert commence par deux excellents morceaux du dernier album -
décrié et visiblement peu connu et apprécié du public de fans qui nous entoure
-, mais que nous, nous avons la faiblesse de bien aimer : c'est un peu lourd et
gras du bide, sans prétentions (très Supergrass, ça, la simplicité, la
modestie), ça ne fait pas progresser le monde d'un iota mais ça fait du bien par
où ça passe... donc "Diamond Hoo Ha Man" et "Bad Blood" inaugurent bien du
concert, malgré un son un peu insuffisant, tant au niveau du volume que de la
clarté (problème habituel de l'Elysée, rappelons-le, d'ailleurs le sound check
s'est éternisé, du fait de difficultés de balance, nous avait confié un videur à
l'entrée...). Et l'heure et vingt-cinq minutes du set sera largement consacrée à
cet album, ce qui frustrera légèrement, je pense, la foule des fans... mais pas
nous, donc : d'ailleurs je me rends compte que j'ai complètement oublié les
titres des deux premiers albums du groupe, datant quand même de plus de dix ans,
et que la mémoire me reviendra (partiellement) lors du rappel... on y
reviendra.
Ce qui est bien, quand on ne vient pas voir un
groupe ou un artiste qu'on apprécie particulièrement, c'est qu'on est finalement
moins critique, plus ouvert, et finalement plus satisfait à la fin (si je
compare par exemple à la demi-frustration ressentie hier à Manu Chao).
Supergrass, c'est gai, sans grande prétention, professionnel (dans le bon sens
du terme) à l'anglaise, et finalement, il n'y a rien à y redire : jolie
utilisation de l'écran lumineux sur certains morceaux, énergie et spontanéité,
complicité entre les musiciens (particulièrement entre le trio de base, mais les
frères rajoutés ne détonnent pas), public enthousiaste qui danse et bouge comme
il faut, voilà un joli petit concert de rock qui ne peut que nous réjouir.
J'apprécie particulièrement la belle version de "Butterfly", déjà excellent sur
le disque, mais, là encore, Gilles B et moi sommes un peu seuls, on sent que les
fans attendent les extraits des deux premiers albums. A un moment - tragique -
je repousse d'un coup de rein la groupie nippone collée à moi, et j'ai la
surprise de l'entendre se mettre à sangloter derrière moi, comme si elle venait
de perdre son père et sa mère dans un tremblement de terre particulièrement
dévastateur à Tokyo : c'est la honte pour moi, indéniablement, me voilà
clairement identifié au premier rang comme le méchant bourreau sans coeur qui
persécute les naines japonaises. Que les âmes sensibles se rassurent, ma victime
se remettra vite, et réapparaîtra un morceau plus tard, toujours aussi
vociférante, hululante (avec des "l" à la place des "r") pour nous labourer le
dos et nous destroyer les oreilles !
On arrive au rappel, unique malheureusement, et c'est la folie générale quand Gaz enchaîne le méga-tube "Alright", puis une reprise saignante d'un early-Police, "Next To You" (rappelez-vous, avant de remplir les stades, Police était un groupe punk, si si !), et pour finir, l'imparable "Caught by the Fuzz"... Là, la mémoire m'est revenue, et je suis tout gai tout gai ! Les slammers sont déchaînés, et une fille manque de se fracasser le crâne dans un spectaculaire crash landing dans la fosse entre les barrières et la scène (ce soir, les videurs l'auront sauvée de la quadriplégie en arrêtant sa nuque à vingt centimètres du béton, oufff !). Voilà, c'est fini, et je dois dire que Gilles B et moi sommes bien contents de tout ça. Bonne soirée rock'n'roll donc, qui donne envie de réécouter un peu ce groupe á côté duquel nous sommes largement passés au cours de ces dix dernières années.
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