"Le Serment des Limbes" de Jean-Christophe Grangé
Lire un bouquin de Grangé, avec ses montées en puissance hystériques et ses
descentes en vrille dans les enfers vaguement grotesques de la psyché humaine,
c'est un peu comme écouter un groupe de death metal un peu inspiré. Ça
impressionne et ça fatigue aussi. Et dès le cinquième morceau, on a compris comment
tout cela est construit, l'excitation de la première surprise peut faire place,
soit à l'ennui vaguement écoeuré (tout cela est vraiment de mauvais goût,
décidément !), soit au plaisir un tantinet masochiste de l'attraction foraine
déjantée. "Le Serment des Limbes" partage donc avec le hard le plus basique sa
fascination pour le diable, et avec Ric Hochet (je rigole, mais pas tant que ça,
on nage ici dans la BD au sens le plus régressif du terme) le projet finalement
assez foireux de jouer à fond le plan du surnaturel pour nous révéler à la fin
que tout cela n'était qu'illusion (ah bon ? Nooooon !). On a cette fois une
bonne longueur d'avance sur le héros un peu lourd de Grangé, et on comprend les
tenants et aboutissants de tout cela une cinquantaine de page avant lui, ce qui
est bon pour notre ego, mais pas pour le fonctionnement d'un bon polar. Bon,
reconnaissons que Grangé a un style plus ambitieux que ses équivalents
anglo-saxons, comme s'il restait en lui un vague désir de faire de la
littérature plutôt que simplement gagner beaucoup d'argent... Et aussi qu'il
y a au moins dans ses polars une ouverture au monde (ici le Rwanda) qui nous
change des éternels traumas familiaux chers au polar de gare anglo-saxon (même si...).